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Les territoires japonais au temps de la Covid-19 – épisode 1

Le 17/03/2022 0

Dans Covid et territoires

L’industrie du sake et le développement des territoires du Tōhoku

Par Raphaël Languillon-Aussel

Notes

Avant-propos. Sake no hosomichi 酒の細道 – sur la sente étroite du sake

Sake relève souvent d’un abus de langage. Utilisé à tort en lieu et place de nihonshu (日本酒, l’alcool de riz), le sake réfère en vérité à tout type d’alcool. Ainsi, le vin est-il un sake, tout comme la bière, le whisky ou encore les liqueurs japonaises que l’on nomme shōchū 焼酎. Or, c’est bien d’alcool de riz dont il est question ici.

L’univers du nihonshu – littéralement « alcool du Japon » – est sans doute aussi vaste que celui du vin. Ainsi en trouve-t-on du sec, du moelleux, du pétillant, du clair ou du trouble, avec ou sans dépôts, plutôt fruité, plutôt iodé, pasteurisé ou non, fine composition de goûts – dont le fameux umami うま味 – et de saveurs... En plus d’être une industrie clé du développement local d’innombrables territoires, le nihonshu est un élément important de la spiritualité japonaise. Il intervient à ce titre non seulement dans de nombreux rites shintō 神道, mais accompagne aussi l’écoulement des saisons, comme l’atteste la pratique du yukimizake (雪見酒 contempler la neige en buvant du sake) et scande le quotidien de nombreux individus – de préférence avec modération – au gré des nomikai 飲み会, les réunions professionnelles alcoolisées, et autres rites sociaux ou familiaux.

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Photographie 1 – Tonneaux de Tōhoku-shu au sanctuaire shinto Ōsaki Hachiman-gū, à Sendai (Miyagi-ken).
Crédits : Raphaël Languillon-Aussel, 7 décembre 2021.

 

Originellement mâché puis recraché – ce que l’on nomme encore kuchikamizake 口噛み酒, le sake mastiqué en bouche – le nihonshu a besoin essentiellement de quatre ingrédients : du riz blanc de qualité, la plupart du temps poli pour n’en garder que le cœur, de l’eau pure et fraîche, des enzymes, dites kōji-kin 麹菌, pour la saccarification, et des levures pour la fermentation. Autrement dit, la qualité des éléments naturels nécessaire à un bon alcool de riz explique la localisation plus ou moins rurale de la plupart des distilleries, ou sakagura 酒蔵, avec une forte concentration dans deux grandes régions de production : le bassin historique entre Kyoto et Nara, et le nord de Honshū, c’est-à-dire le Tōhoku.

C’est justement dans le Tōhoku que nous transporte ce premier épisode de la série « Covid et territoires » de l’Institut français du Japon, pour y récolter le témoignage de Monsieur Koichi SAURA, directeur de la brasserie Urakasumi1, à Shiogama, et vice-président de deux importantes associations de ce secteur d’activité : l’Association des producteurs de sake japonais et de shōchū (日本酒造組合中央会, Nihon shuzō kumiai Chūōkai), surnommée SAKAGURA2 ; et le Conseil japonais pour la promotion du tourisme dans les brasseries de sake (日本酒蔵ツーリズム推進協議会, Nihon sakagura tsūrizumu suishin kyōgi-kai), dite aussi SAKAGURA Tourisme3. Nous accompagnent également le professeur HOSONO, émérite en politiques publiques de l’université de Chūō et président de SAKAGURA Tourisme, ainsi que Monsieur Masahiro SUGINO, membre éminent de l’Association Japonaise du Voyage et du Tourisme (日本観光振興協会, Nihon kankō shinkō kyōkai4) et secrétaire général de SAKAGURA Tourisme. Ce qui suit est le compte-rendu synthétique de ces presque deux heures de discussion.

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Photographie 2 – Corps principal de la brasserie Urakasumi, à Shiogama (Miyagi-ken) : un complexe chargé d’histoire.
Crédits : Raphaël Languillon-Aussel, 7 décembre 2021.

 

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Photographie 3 – Bâtiments et annexes de la brasserie Urakasumi, à Shiogama (Miyagi-ken).
Crédits : Raphaël Languillon-Aussel, 7 décembre 2021.

 

Le nihonshu est le produit de la rencontre des milieux naturels et des dynamiques sociales locales. Quels en sont les enjeux territoriaux ?

Le nihonshu est dépendant de la qualité de l’eau et du riz. L’eau doit être pure. Mais l’eau pure n’est pas un produit standard ni homogène. Elle est très variable, et ses propriétés naturelles sont fonction des caractéristiques du milieu et des structures géologiques qu’elle traverse. Chaque source a donc ses spécificités en termes d’acidité, d’oligo-éléments, de gaz, d’impuretés… si bien qu’aucune ne se ressemble. C’est donc une ressource locale. Le riz est lui aussi dépendant des terroirs de production, même si au Japon on insiste plutôt sur l’importance des variétés qui, elles, ne sont pas forcément géographiques. Pour produire les alcools de riz les plus fins, on polit les grains pour ne garder que le cœur. Il en faut donc une grande quantité. Les meilleurs sake gardent parfois moins de 40 voire 30 % du volume des grains de riz après polissage, d’où leur prix plus élevé.

Depuis de très nombreuses années, la consommation de nihonshu baisse dans tout le pays, pour diverses raisons : transformation des goûts des consommateurs, image vieillissante du produit, concurrence d’autres alcools, y compris de l’étranger, production à coûts plus faibles d’alcools de riz venant de Chine ou d’autres pays d’Asie, contraction de la population active et donc baisse de la consommation ritualisée d’alcool dans les réunions professionnelles (les nomikai)… Les raisons sont très variées, mais concourent à une nette tendance baissière qui explique que la production de nihonshu ait été divisée par trois depuis les années 1970, entraînant une crise réelle du secteur et la fermeture d’innombrable brasseries. Il en resterait un millier et demi, dans des états de santé économique parfois précaires.

Pour lutter contre la dégradation de la situation, deux stratégies ont été mises en place. Tout d’abord, la refonte du système de classement des nihonshu par niveaux de qualité. Auparavant, une loi de 1943 avait instauré une catégorisation en trois classes (ou Kyū ), appelée Kyūbetsu Seido 級別制度. Cette classification était fondée sur une dégustation des nihonshu par des membres du gouvernement qui leur accordaient un rang en fonction de la qualité, essentiellement gustative, indépendamment des techniques et des conditions (donc des coûts) de production. Or, de la classe dépendait le niveau de taxation des alcools, si bien qu’un nombre de brasseries, pris à la gorge de la baisse de la consommation et donc de leurs bénéfices, demandèrent leur déclassement à la fin des années 1980, voire renoncèrent à la qualité pour se focaliser sur la quantité, moins taxée. Le dispositif, pensé pour favoriser la montée en gamme des nihonshu, a eu, en temps de crise, l’effet inverse.

En 1992, a lieu la refonte du système de 1943, qui est alors remplacé par un autre. Ce dernier privilégie les techniques de production et la qualité intrinsèque du produit sur le goût. Il se concentre à ce titre essentiellement sur deux critères : le taux de polissage des grains de riz (plus le taux est bas, plus le grain est réduit, et donc poli, ce qui est sensé rendre l’alcool meilleur et, par conséquent, plus cher, et de ce fait plus rémunérateur du travail effectué) ; l’ajout ou non d’alcool pur au cours de la fermentation. Pour les vins de riz sans ajout d’alcool, le grade le plus élevé est alors celui du junmai daiginjō-shu (純米大吟醸酒) caractérisé par un taux de polissage inférieur à 50 % (soit une réduction de plus de la moitié de la taille des grains de riz utilisés).

La montée en gamme encouragée de fait par la refonte du système de classification des nihonshu a été poursuivie dans les années 2000 et 2010 avec l’apparition de marques nationales (par opposition aux sake dits « locaux » - 地域の日本酒 chiiki no nihonshu) et l’émergence d’appellations géographiques protégées (IGP) à l’image des vins en Europe. Les premiers départements à avoir mis en place cette nouvelle labélisation ont été ceux de Hyogo-ken (Kobe) et Kyoto-fu. Même si la pratique est encore minoritaire, avec moins d’une dizaine d’IGP dans tout le pays, elle marque un tournant majeur dans l’industrie du nihonshu et dans le rôle que les brasseries sont amenées à jouer au sein du développement local des territoires. Ce changement n’est pas sans générer des tensions parmi les producteurs, certains préférant ne garder que le système de 1992, d’autres poussant à la protection géographique. La lutte oppose surtout les grandes marques nationales aux sake locaux, ces derniers étant plus enclins à valoriser les techniques de production que l’inscription dans des terroirs classés.

 

En quoi le nihonshu du Tōhoku est-il spécifique par rapport au reste du Japon ?

Le Tōhoku est, avec le bassin de Naha, entre Kyoto et Nara, l’une des principales régions de production de nihonshu – on parle à ce titre de Tōhoku-shu. L’autre grand alcool du Japon, le shōchū (ou vodka japonaise) est plutôt produit au sud, dans le Kyūshū. Le fait que le Tōhoku soit aussi l’un des greniers à riz du pays, et compte de nombreuses sources grâce à ses chaînes de montagne d’orientation méridienne, n’est pas un hasard. Son climat froid en hiver est aussi une caractéristique forte et un puissant atout. Deux de ses départements sont particulièrement réputés pour le nihonshu : Akita et Fukushima. On comprend alors pourquoi la catastrophe nucléaire de Fukushima, qui a touché de plein fouet l’un des départements les plus importants de l’industrie, a été particulièrement difficile pour les producteurs de la région : perte de territoire avec la zone d’évacuation, radioactivité diffuse dans les terrains de montagne prise en charge par l’hydrographie qui en contamine l’eau de surface et de sous-sol, pénurie énergétique, sans compter les ruptures logistiques.

 

Quel a été à ce titre l’impact de la catastrophe de Fukushima sur le Tōhoku-shu ? Quel a été le rôle de ce dernier dans la reconstruction de la région après 2011 ?

La catastrophe du 11 mars 2011, marquée par le tremblement de terre, le tsunami et l’explosion nucléaire de Fukushima, est intervenue à un très mauvais moment du point de vue de la production de nihonshu. C’est en effet une période qui précède les célébrations de hanami 花見, où les Japonais se retrouvent en famille, entre amis ou collègues, pour aller boire et manger sous les cerisiers et contempler la floraison fugace des fleurs. C’est donc en mars que les sake sont expédiés vers les principaux bassins de consommation, Tokyo en tête. Or, non seulement le tremblement de terre et le tsunami ont détruit ou interrompu une partie des chaînes logistiques, en partie à cause de dommage sur certaines infrastructures de transport5 utilisées pour l’acheminement de la production, mais en plus le pays est entré en deuil, et la population a de ce fait restreint sa consommation d’alcool en même temps que l’ampleur des festivités de printemps. Les exportations de nihonshu vers Tokyo ont ainsi été rendues presque impossibles pendant un mois à une période traditionnellement de fortes ventes, et les dommages ont été rudes pour le Tōhoku-shu.

Rapidement, des voix se sont alors fait entendre. La première est partie d’un membre de la branche d’Iwate de SAKAGURA. Son appel à l’aide dans la vidéo qu’il a posté sur Youtube a été viral. Il y invitait les Japonais et les Japonaises à soutenir les territoires du Tohoku, et en particulier les producteurs de nihonshu dont l’importance pour les économies locales est cruciale. Il demandait à assouplir le deuil et à reprendre une consommation ordinaire d’alcool pour aider la région à se redresser. Il associait ce faisant en partie la résilience des territoires à la consommation d’alcool local par l’ensemble du pays. Rapidement, tout le monde s’est ainsi mis à encourager la renaissance du Nord en buvant son Tōhoku-shu. Une campagne touristique a aussi été mise en place et permit d’attirer des consommateurs et des fonds. Des circuits axés sur les brasseries, un peu à l’image des routes du vin en France, ont vu le jour. La SAKAGURA a joué un rôle majeur dans ce soutien aux territoires, d’une part en mettant en place un site Internet et des actions en faveur d’un tourisme culturel et gastronomique centré sur le nihonshu6, et d’autre part en arbitrant avec intelligence et solidarité les différents entre producteurs et régions de production de nihonshu. La reconstruction du Tōhoku est donc devenue le symbole de la capacité de SAKAGURA à faire collaborer les acteurs entre eux et à faire revivre les territoires par la production et la consommation d’alcool de riz malgré le contexte historiquement déclinant du secteur d’activité – et les tensions afférentes à cette situation structurelle dans l’ensemble du pays.

 

Quel a été l’impact de la Covid sur le nihonshu du Tōhoku ? La crise sanitaire est-elle comparable dans ses effets sur les territoires et l’industrie du sake à ceux de la crise sanitaire de Fukushima ?

Les conséquences de la catastrophe du 11 mars et de la crise sanitaire de Fukushima sont très différentes de celles du coronavirus. Contrairement à 2011, la situation en 2020 et 2021 n’est pas propre à une seule région et limitée au seul Tōhoku. Elle a au contraire touché tout le pays. On observe bien quelques similitudes toutefois, comme par exemple la temporalité (la crise apparaît elle aussi aux alentours du printemps et des festivités de hanami, comme pour Fukushima) ou encore la place prépondérante du deuil dans la baisse de la consommation d’alcool par la population. Mais la comparaison s’arrête là, et les impacts de la Covid-19 sur l’activité des brasseries du Tōhoku sont les mêmes que partout ailleurs. Aucun traitement de faveur pour le nord de Honshū du coup, et l’arbitrage de SAKAGURA s’en trouve complexifié.

Cependant, toutes les brasseries ne sont pas logées à la même enseigne. En règle générale, les sake locaux (chiiki no nihonshu) sont consommés localement dans les izakaya (居酒屋, les tavernes japonaises) qui bénéficient de liens de solidarité forts avec tout un réseau de brasseries qui leur est propre et qui les approvisionne régulièrement. Or, avec les couvre-feux dans de nombreuses grandes villes, dont Sendai mais aussi celles du Kantō, Tokyo en tête, et l’incitation au télétravail et à l’auto-confinement, la consommation en extérieur a drastiquement chuté, et s’y est substituée une consommation à domicile. En plus d’être consommé moins abondamment que dans les izakaya, l’alcool acheté par les particuliers provient essentiellement de la grande distribution, qui se focalise soit sur les grandes marques, soit sur la production de masse de faible qualité – en un mot, sur un circuit de commercialisation national. La situation a donc joué en la défaveur des productions locales, qui ont été les grandes perdantes de la fermeture et de la désertion des izakaya, le relais principal de leur production. La crise sake local-izakaya est donc celui de la production et du développement local, au profit (relatif) de la grande distribution de quelques brasseries stars d’envergure nationale ou de sake de table distribué en masse (parfois importé de l’étranger, d’ailleurs).

La consommation à domicile, seul ou en comité réduit, dans le cercle familial, a également accentué deux autres tendances de fond : d’une part, la préférence pour des alcools moins forts (highball, bière et alcool en cannette…) et les formats faciles à transporter (comme les cubis, souvent de qualité moins bonne que les bouteilles ou les fûts) ; d’autre part, la croissance des boissons importées, dont le vin qui a en outre bénéficié d’un abaissement de la taxation, ce qui l’a rendu plus accessible. Autant Fukushima et le 11 mars ont été une crise conjoncturelle, même si les effets de la contamination de la radioactivité tendent à devenir structurels en raison de leur durée de vie, autant la crise de la Covid-19 et ses effets sur l’industrie du nihonshu ont été des révélateurs et des accélérateurs de tendance de long terme que l’on observait déjà. L’impact ponctuel sur la consommation a accentué des signaux de moins en moins faibles, comme par exemple la baisse de fréquentation des izakaya, qui n’avait pas attendu la crise sanitaire mais dépend, comme pour la consommation d’alcool, d’un faisceau de causes multiples dont les deux principales sont la baisse de la population active et la transformation des goûts et des pratiques de commensalité.

Le secteur a toutefois essayé de se transformer pour résister à la crise. Comme ailleurs, il s’est saisi des possibilités offertes par les outils numériques pour moderniser sa communication. Ainsi, inspirés des célèbres apéro-Zoom, les séances de dégustation en ligne se sont multipliées, adossées à des services de livraison à domicile des boissons. De la même façon, le secteur s’est saisi de plateformes nouvelles, comme Youtube, pour faire la promotion de ses produits, basculant dans l’ère du digital. Bénéficiant de la proximité raisonnable du public urbain tokyoïte, qui en est le débouché historique, la localisation du Tōhoku-shu est, à ce titre, plutôt favorable.

 

Dans ce contexte difficile, quel est l’avenir du Tōhoku-shu et, au-delà, du nihonshu ?

Une partie de l’avenir de l’alcool de riz japonais réside dans son exportation. L’étranger constitue un marché qui pourrait équilibrer les pertes et la tendance baissière du marché intérieur. Pour ce faire, les producteurs de nihonshu comptent surfer sur la vague du « Cool Japan » qui bénéficie déjà aux jeux vidéo et aux mangas, et changer par la même occasion l’image traditionnelle et un peu poussiéreuse du sake japonais. La demande chinoise, et tout particulièrement de Hong-Kong, est à ce titre importante, même si les considérations géopolitiques comme le sort que la Chine réserve à Hong-Kong constituent une inconnue de taille. Une autre option est la promotion du tourisme national et international, afin de faire venir boire les clients directement dans les territoires de la région. Mais que ce soit dans l’encouragement à l’exportation ou dans la promotion du tourisme, le nihonshu du Tōhoku est handicapé par l’héritage encombrant de Fukushima. Rappelons que le département de Fukushima est un des deux principaux producteurs d’alcool de riz de la région. Or, si l’image de Fukushima varie d’un pays à l’autre, elle pèse défavorablement dans l’accès aux marchés européens et nord-américain, alors que ceux-ci constituent les destinations privilégiées des produits culturels du « Cool Japan ». La réticence à consommer les produits de Fukushima est un des principaux freins à la stratégie actuelle de renaissance du Tōhoku par le nihonshu et l’agriculture.

Une autre évolution réside dans la labellisation. Elle se décline en de nombreuses démarches, dont la principale se trouve être l’inscription du nihonshu sur la liste du patrimoine immatériel de l’UNESCO. Elle a pour corollaire la résurrection de techniques de production anciennes (parfois de l’ère Meiji voire de l’ère médiévale d’Edo) et la redécouverte de variétés d’ingrédients inusitées, en particulier concernant d’anciennes levures ou des kōji-kin abandonnés. La labellisation accélère le retour à la tradition – ce qui n’est pas sans contredire l’image nouvelle recherchée dans l’exportation vers les pays occidentaux. Dans ce travail d’identification et cette quête de reconnaissance, des distilleries voire des gouvernements locaux cherchent à promouvoir et à garantir la provenance et l’authenticité des alcools. C’est le cas du département de Yamagata, dans le Tōhoku, qui mise sur le terroir en reconstruisant du narratif autour des nihonshu produits à partir de la spécificité de son fūdo7 (風土, milieu naturel aménagé par les sociétés sur le temps long), la typicité de son riz local et de son eau, son savoir-faire et la longue histoire de ses brasseries. La logique géographique s’inspire de ce qui existe déjà dans d’autre type de production, comme par exemple le fameux « bœuf de Kobe », réputé dans le monde entier ou, pour les fruits et les légumes, les célèbres mangues de Miyazaki surnommées « taiyō no tamago » (太陽の卵, les « œufs du soleil »). Le chemin est encore long toutefois avant un retour à la prospérité.

 

Conseils bibliographiques sur le sujet :

Nicolas Baumert, 2009, Le saké : géographie historique et culturelle d'une exception japonaise, thèse de doctorat soutenue sous la direction de Jean-Robert Pitte à Paris 4, dans le cadre de l’École doctorale de Géographie de Paris.

Japan Sake and Shochu Makers Association and National Research Institute of Brewing, 2011, A Comprehensive Guide to Japanese Sake, Raport, Japan Sake and Shochu Makers Association, 71 p.

Makoto Yano, Fumihiko Matsuda, Anavaj Sakuntabhai et Shigeru Hirota (dir.) (2021), Socio-Life Science and the COVID-19 Outbreak, Tokyo, Springer, 353 p.

 

Notes

1 https://www.urakasumi.com/ (dernière consultation en février 2022).

2 https://www.japansake.or.jp/sake/ (dernière consultation en février 2022).

3 https://www.japansake.or.jp/tourism/contents/en/?mode=sake (dernière consultation en février 2022).

4 https://www.nihon-kankou.or.jp/ (dernière consultation en février 2022).

5 Dans l’ordre des infrastructures remises en état, les militaires ont d’abord concentré leur effort sur l’aéroport de Sendai, inondé par le tsunami et rapidement nettoyé. Le shinkansen n’a repris que le 29 avril 2011.

6 https://www.japansake.or.jp/tourism/contents/en/?mode=sake (dernière consultation : février 2022).

7 Amplement discuté par la littérature académique japonaise et française, le terme de fūdo est à mi-chemin entre les notions de terroir, de paysage et de milieu, et s’approche, toute chose étant égale par ailleurs, de la définition des célèbres « climats » bourguignons.

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